PMA : le Conseil d’État s’érige en censeur

Ils n’ont pas honte !

PMA : le Conseil d’État s’érige en censeur

Alexandre Fache

La juridiction administrative estime que refuser une Procréation médicalement assistée à un couple de femmes infertiles est… normal.

«C’est proprement invraisemblable !» Hier, l’avocate Caroline Mécary n’avait pas de mots assez durs pour qualifier la décision surprenante rendue vendredi par le Conseil d’État, énième rebondissement sur le chemin d’une procréation médicalement assistée (PMA) ouverte à toutes.

Conseil d’un couple de lesbiennes dont l’une est touchée par une infertilité pathologique, Me Mécary avait déposé une question prioritaire de constitutionnalité pour vérifier si le refus de PMA opposé à ses clientes par le CHU de Toulouse en avril n’était pas discriminatoire. Réponse : non. « La différence de traitement entre les couples » hétérosexuels ou homosexuels « n’est pas contraire au principe d’égalité », tranche la plus haute juridiction administrative, qui précise même : « Le principe d’égalité ne s’oppose ni à ce que législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général. » Une décision inique, sur le fond comme sur la forme, pour Caroline Mécary. « Normalement, le Conseil d’État ne joue qu’un rôle de filtre, avant transmission au Conseil constitutionnel, explique l’avocate. Il vérifie si la question est sérieuse, si elle n’a pas déjà été posée, et si elle correspond bien à une loi. C’est le cas. Et pourtant, le Conseil d’État s’est arrogé le droit de décider tout seul, dans son coin. Il a outrepassé ses pouvoirs et s’est érigé en censeur. » Une divine surprise accueillie avec joie par les opposants à la PMA pour toutes. Celle-ci « n’est pas une réponse à un problème de discrimination ni une mesure d’égalité », s’est félicitée Ludovine de La Rochère (la Manif pour tous). De quoi infléchir les choix à venir de l’exécutif ? « Non, veut croire Me Mécary. Cette décision sera vite oubliée. Depuis 2015, la PMA pour toutes a été soutenue par le Haut Conseil à l’égalité, le Défenseur des droits, le Comité d’éthique… Même le Conseil d’État a dit en juin dernier qu’elle ne soulevait pas d’obstacle juridique. C’est aux responsables politiques désormais de prendre leurs responsabilités. »