Caroline Mecary, Khmer rose

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Avocate, Me Mecary est la première à avoir défendu les familles homoparentales, en 1996. À l’entendre, il n’y aurait pas de fondement biologique, uniquement des évolutions de société. Portrait de cette émule d’un progrès sans borne.

C’est un visage anguleux, altier et menaçant qui apparaît à l’écran chaque fois que l’on évoque, sur une chaîne de télévision, la question de l’égalité des droits entre homosexuels et hétérosexuels. Une faconde d’automate, qui réitère toujours les mêmes arguments, à propos de la procréation médicalement assistée (PMA) et de la gestation pour autrui (GPA). Caroline Mecary est de celles qui pensent que la France est « en retard » . D’où le zèle dont elle fait preuve pour permettre à ses clients de rattraper le temps perdu, repousser les limites, permettre à la technique d’étendre son empire sur l’anthropologie.

Cette avocate de 55 ans, fille d’un Libanais maronite et d’une Stéphanoise, inscrite aux barreaux de Paris et du Québec, est une icône de la cause LGBTI (lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexes) depuis 1997, date à laquelle elle organisa un colloque sur le droit et l’homosexualité. Les débats de l’époque autour du pacte civil de solidarité (Pacs) en appelleront bien d’autres, et de plus virulents. Une mobilisation réflexe des « forces réactionnaires » jusqu’au jour où, pour « notre bonheur », tout sera permis. Ce jour-là, l’absence de père sera institutionnalisée par la PMA et la mère porteuse, conformément à la prédiction de Pierre Bergé, ne sera plus qu’un ventre à louer. Ce qui frappe toutefois le plus Ludovine de La Rochère, présidente de La Manif pour tous, n’est pas la limpidité du discours de Caroline Mecary, qu’elle a maintes fois affrontée en plateau, mais le mélange des genres qui l’enrobe : « Elle se pose en expert, mais c’est une militante qui utilise le droit pour obtenir des changements de loi. De même, elle se dit féministe, mais elle est favorable à l’effacement de la mère porteuse au profit du parent d’intention. »

Une nouvelle législation sur la PMA est attendue début 2019. Pourtant, Caroline Mecary trépigne. Cette fois, elle le jure, « les Français sont prêts » , prêts pour tout, avec ce lexique du grand voyage, une extension du domaine de la lutte libertaire, employé pour nous dire qu’il n’y a plus trace d’essence, rien que des existences, plus aucun fondement, uniquement des évolutions. Elle est l’avocate des époux Mennesson, ces hétéros parents de jumelles nées par GPA et qui lui ont servi de cheval de Troie. Avec eux, elle a fait condamner la France, qui refusait de reconnaître leur lien de filiation, par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), en 2014.

Toutefois, ses échecs, bien que retentissants, ne sont jamais aussi médiatisés que ses victoires. Lorsqu’un couple de femmes sollicite le recours à la PMA à Toulouse, en 2018, elle plaide la pathologie de la fertilité de l’une d’entre elles. La CEDH rétorque que cette demande est irrecevable, toutes les voies de recours n’ayant pas été épuisées auprès de la juridiction française. Quand l’avocate se tourne alors vers le Conseil d’État, celui-ci lui rappelle que « les couples formés d’un homme et d’une femme sont, au regard de la procréation, dans une situation différente de celle des couples de personnes de même sexe » .

Un avertissement pour « manquement aux principes essentiels de la profession »

Hors champ idéologique, il y aurait, également, beaucoup à dire sur Me Mecary. Au barreau de Paris flotte un air de vindicte, son nom surgit sur fond de scandales. Soutien de la candidate Christiane Féral-Schuhl au moment de l’élection du bâtonnier, en 2010, elle avait envoyé un courriel à 22 000 confrères visant à salir l’adversaire de Me Féral-Schuhl, Me Pierre-Olivier Sur, en l’accusant de mensonges et de conflit d’intérêts. « Comment cela s’appelle-t-il ? » , demandait l’e-mail, qui traitait le grand pénaliste de « pompier pyromane » . Convoquée en Conseil de discipline, elle avait échappé à la poursuite mais écopé d’un avertissement pour « manquement aux principes essentiels de la profession, notamment de délicatesse ».

Il y a aussi un nom qui ressort régulièrement lorsque l’on interroge des avocats au sujet de Caroline Mecary. C’est celui de Yann Streiff, ce confrère néanmoins ami suspendu du barreau, en mai 2018, et menacé de radiation. Me Streiffest au centre d’une « petite affaire Bettencourt » qui a secoué le monde des robes noires dans le courant des années 2010. Suspecté d’abus de faiblesse à l’égard de sa cliente, Nicole Hirigoyen, il est également mis en cause dans la succession du peintre Vasarely. Défenseur de Me Mecary devant le Conseil de discipline, en 2011, pour l’affaire de l’e-mail, Me Streiff avait par ailleurs obtenu un poste clé auprès de Christiane Féral-Schuhl, la candidate qui l’avait finalement emportée. Le clan Mecary semblait alors intouchable.

« Au fond, c’est une grande humaniste incomprise », s’amuse un avocat

Des petits renvois d’ascenseur, une certaine idée de l’éthique. Une tentative, aussi, d’inclure 23 toiles de son choix parmi les tableaux de la peintre Joan Mitchell, en tant qu’honoraires de résultat. C’était en 2003, elle était alors l’avocate d’héritiers dans le cadre de la succession de l’artiste. La cour d’appel avait bien entendu annulé la clause, Mecary s’était alors pourvue en cassation. Pourvoi rejeté. « Au fond, c’est une grande humaniste incomprise » , s’amuse un avocat du barreau de Paris, qui rappelle qu’elle a un temps siégé simultanément au conseil régional d’Île-de-France sous l’étiquette Europe Écologie-Les Verts (EELV) et au Conseil de Paris (PS) pour le XIVe arrondissement. Elle aurait échappé à l’exclusion d’EELV en remettant in extremis sa démission.

Un autre confrère nous fait cette remarque, qui prend tout son sens au moment où de modestes entrepreneurs revêtent un gilet jaune et rappellent à la gauche, cette gauche des élites, qu’elle a failli, trahi : « Elle a pu affirmer qu’elle ne comprenait pas les petits patrons qui disaient être écrasés par les charges alors que ses activités politiques venaient généreusement compléter ses honoraires. » Comment se fait-elle, encore, rémunérer par les organismes subventionnés comme l’ADFH (Association des familles homoparentales) et l’association des époux Mennesson ? Comment cela s’appelle-t-il ? au fond, de quoi Caroline Mecary est-elle le nom, sinon celui de l’oligarchie progressiste qui a fait sécession et dont les Français ont, ces jours-ci, exprimé massivement le rejet ?