«On a beaucoup entendu les anti, c’est le cri des perdants»
En direct – Des intégristes prient pour changer les parlementaires
Les députés commencent à étudier le projet de loi sur le mariage pour tous, très disputé. Les débats devraient durer deux semaines. Suivez également le débat en vidéo.
Les points forts
Heure par heure : «Le mariage pour tous n’est pas un mariage au rabais» pour Taubira
Les réactions :«On a beaucoup entendu les anti, c’est le cri des perdants»
Ce que prévoit le projet de loi
L’opposition fourbit ses armes
Le calendrier législatif
L’essentiel
• Véritable marathon législatif, le débat sur le mariage pour tous a débuté ce mardi 29 janvier peu après 16 heures à l’Assemblée nationale. L’examen du projet de loi devrait durer deux semaines, soirées et week-ends inclus.
• Promesse phare de la campagne de François Hollande, cette réforme divise la société française : dimanche, entre 125 000 et 400 000 partisans du mariage pour tous se sont rassemblés à Paris. Le 13 janvier, les opposants au projet de loi étaient entre 340 000 et un million à avoir manifesté dans la capitale.
• Le gouvernement a réaffirmé à plusieurs reprises sa volonté de faire adopter cette réforme, y compris devant ses opposants, reçus par François Hollande à l’Elysée vendredi dernier.
Diaporama la manifestation en faveur du mariage pour tous en images
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Ainsi que L’obstruction parlementaire, une vieille pratique
23h35. Suspension de séance.
Ca chauffe. «Bal des hypocrites» d’un côté, «procès d’intention de l’autre» attaques sur «l’homophobie» des propos, suspension de séance… tout cela fait partie du jeu.
23h20. Lobby homo.
Bruno Le Roux, patron du groupe PS, met les choses à plat: «Dès cet été, deux hommes pourront se dire oui devant leur maire. Dès cet été, deux femmes pourront se dire oui devant leur maire. Et oui, un homme et une femme pourront toujours se dire oui devant leur maire.» Pareil pour l’adoption, continue-t-il. «Il n’y a ni surprise ni reniement». La droite tonne. Il attaque: «vous parlez parfois de lobby gay, mais qui sont les homosexuels? Nos frères, nos cousins, nos collègues, nos voisins, nos copains, nos coéquipiers…Ils aspirent juste à vivre comme tout le monde.»
22h45. Pour la bataille de l’égalité.
Sergio Coronado, élu EELV, rappelle comment a commencé la
«bataille de l’égalité». Et comment, le 5 juin 2004, Noël Mamère a marié deux hommes à Bègles , avant de se faire suspendre de ses fonctions. Le maire écolo avait alors reçu 4 000 lettres d’insultes. S’adressant à la droite, Coronado fait le lien avec les propos d’aujourd’hui. «Les mots sont mieux choisis, mais ils peinent à habiller la violence qu’ils portent». «C’est le triomphe de l’inquisition», proteste Mariton. Coronado poursuit: «que deux hommes ou deux femmes puissent fonder une famille cela vous est insupportable». On entend à droite un cri du coeur: «oui». Puis une voix désolée: «c’est nul».
22h10. Reprise.
Hervé Mariton est à la tribune. Il est l’un des opposants les plus énergiques au mariage pour tous. Il s’adresse aux rangs de la gauche: «certains d’entre vous sont sous pression. Je m’adresse à vous pour que vous ne votiez pas ce texte…». «C’est pas gagné» rigolent des députés PS.
21h12. Prière catho pour changer les parlementaires
Plus d’une centaine de catholiques intégristes se sont réunis devant l’Assemblée Nationale, pour «prier la Vierge Marie» de «changer l’attitude des parlementaires» favorables au projet de loi sur le mariage homosexuel. Entourés par un important déploiement de forces de l’ordre, les manifestants, chapelets en mains, ont récité des prières agenouillés devant une statue de la Vierge Marie et un tableau représentant la Sainte Famille. L’abbé Régis de Cacqueray, le responsable de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X en France, et l’abbé Beauvais, prieur de l’église lefébvriste parisienne de Saint-Nicolas-du-Chardonnet, dirigeaient les prières des protestataires, dont certains brandissaient des drapeaux frappés du Sacré Coeur, un coeur surmonté d’une croix rouge.
20h45. La séance est suspendue.
Erwann Binet le rapporteur du texte, (nouveau) député de l’Isère souffle: «c’était rude». Devant les caméras il regrette «la violence de certains propos» entendus en séance. «La droite a une stratégie guerrière, elle veut éviter les débats», pense -t-il.«Moi je veux qu’on parle des familles, des enfants, des couples». Il poursuit, avant d’aller se requinquer au dîner organisé par Claude Bartolone, avant la reprise de la séance, «A droite, ils essayent de nous déstabiliser, surtout nous les jeunes parlementaires, en pensant qu’on est des proies faciles. Mais là, ils se trompent».
20 heures. La motion de rejet préalable est repoussée
L’Assemblée nationale repousse, par 272 voix contre 169, la motion de rejet préalable du projet de loi sur le mariage homosexuel défendue au nom de l’UMP par Henri Guaino. «Ce n’est pas une motion de rejet préalable, mais de regret du passé», a lancé à M. Guaino la ministre de la Justice, Christiane Taubira. «Vous vous agrippez à un ordre que vous vous croyez immuable». Rappelant que jusqu’en 1938, le code civil imposait à la femme «obéissance» à son mari, elle s’est exclamée : «que vous souhaitiez conserver cet aspect du mariage, c’est votre liberté !».
18h30. Guaino monte au créneau
Le député UMP des Yvelines, ex-conseiller spécial de Nicolas Sarkozy, s’est lancé dans un argumentaire contre le projet de loi. «Dans quelle société voulez-vous nous faire vivre?», s’est interrogé Henri Guaino . «Avec ce texte, que vous le vouliez ou non, il ne s’agit pas seulement de prendre position sur une mesure, ou sur une loi. C’est plus qu’un texte, c’est un débat sur les valeurs d’une société. Nous avons à prendre position sur les valeurs d’une civilisation. Ce texte, c’est la négation de la différence des sexes», a-t-il dit, applaudi par l’opposition. «Il s’agirait là de donner le droit d’avoir des enfants à des couples auxquels la loi de la nature ne le permet pas», a-t-il encore assuré, déclenchant des protestations dans l’hémicycle.
«Nous sommes dans un régime parlementaire mais sur des sujets d’une importance exceptionnelle. Le choix du référendum est une obligation politique, intellectuelle et morale», a-t-il ajouté. «C’est une loi qu’on ne peut pas prendre à l’essai», a-t-il lancé, fustigeant «un simulacre» de débat et évoquant une majorité qui «viole les consciences». Il s’agit d’une «décision quasi irréversible, seul le peuple souverain a le droit de la prendre», a-t-il plaidé. «Nous avons à prendre une position sur une politique de civilisation», a-t-il dit. «Allons-nous leur répondre seulement par ces deux mots terribles taisez-vous?», a-t-il dit.
17h15. «Une avancée sociétale»
Au tour d’ Erwann Binet (photo AFP), le rapporteur du texte : «Ce projet de loi est une avancée sociétale, un bond en avant des libertés publiques. […] Les familles homoparentales existent. Ce débat aura permis de mettre au jour ces familles devant de nombreux Français qui en ignoraient même l’existence.» «Etre père ou être mère, ce n’est pas des hormones et des gènes. C’est une volonté, une construction.»
A lire aussi le portrait d’Erwann Binet
17 heures. «On vient de loin»
Christiane Taubira cède sa place à Dominique Bertinotti , la ministre déléguée à la Famille (photo AFP). «Il a fallu attendre 1990 pour que l’OMS retire l’homosexualité des maladies mentales. On vient de loin.» «Dès 1804, lors de l’élaboration du Code civil, Napoléon disait : les lois sont faites pour les moeurs et les moeurs évoluent.» (…) «Oui, nous proposons une vision généreuse de la famille qui inclut et non qui exclut.»
16h35. «Pas un mariage au rabais»
La garde des Sceaux Christiane Taubira , première à s’exprimer dans ce débat, retrace l’histoire du mariage et «la laïcisation du Code civil», tandis que les bancs des députés se remplissent petit à petit. La gauche l’applaudit quand la ministre affirme que «l’évolution du mariage porte fortement la marque de la laïcité, de l’égalité et de la liberté». «Il ne s’agit pas d’un mariage au rabais, pas d’une union civile soi-disant aménagée», défend Taubira. «C’est un acte d’égalité. Il ne s’agit pas d’un mariage au rabais, il ne s’agit pas d’une ruse, pas d’une entourloupe, il s’agit d’un mariage avec toute sa charge symbolique, et toutes ses règles d’ordre public». «Contre nature !», entend-on à droite.
La première altercation entre Taubira et la droite éclate. La garde des Sceaux s’adresse à l’opposition : «Vous protestez au nom d’un droit à l’enfant». Et la droite de corriger : «Droit de l’enfant !». La ministre termine son discours sous les applaudissements de la gauche.
Sur Twitter, le député UMP Philippe Gosselin ironise sur l’intervention de Christiane Taubira.
A l’inverse, la députée socialiste Corinne Narassiguin salue, sur le même réseau social, la prestation de la ministre de la Justice.
Le journaliste du Monde Thomas Wieder va plus loin, estimant que Christiane Taubira va «entrer dans l’histoire».
16h25. La droite s’est passé le mot pour dénoncer un «texte de diversion»
Le maire de Levallois Patrick Balkany (UMP), dénonce ainsi un «écran de fumée». «Pendant ce temps, on ne parle pas du chômage», accuse-t-il.
15h45. Une «vraie avancée» pour Ayrault
Devant les députés, Jean-Marc Ayrault fait le «pari» que «dans quelques années» la droite jugera que le mariage gay constitue une «avancée», comme elle l’estime aujourd’hui pour le Pacte civil de solidarité (Pacs) après avoir bataillé contre sa création il y a quinze ans. S’adressant aux bancs de l’opposition, Jean-Marc Ayrault poursuit : «Combien d’entre vous m’ont dit quelques années après « nous étions contre mais aujourd’hui nous reconnaissons que vous avez eu raison »? Je prends le pari que demain beaucoup d’entre vous viendront me dire: « C’est une avancée, vous aviez eu raison de le faire »» à propos du mariage gay.
15h25. La Barjot débarque
Arrivée en scooter et casque rose, Frigide Barjot, égérie des anti-mariage homo, vient assister au débat à l’Assemblée nationale.
Photo Jacques Demarthon. AFP
15 heures. PSA s’invite dans le débat
L’hémicycle est bien rempli et bruisse du brouhaha des grands jours. La situation chez PSA s’invite dans le débat. La ministre délégué à la Famille, Dominique Bertinotti, tente de couper court : «Je ne vois pas l’intérêt d’introduire de la confusion dans le débat en jouant sur la peur pour inquiéter nos concitoyens.»
A lire aussi le portrait de Dominique Bertinotti
14h55. «Faux conflit, vrais enjeux»
Dans un coin, Nicolas Dupont-Aignan (Debout la République) peste en voyant l’affluence, salle des Quatre-colonnes. «La classe politique de droite et de gauche se focalise sur ce projet pour faire oublier son incompétence à traiter le chômage de masse. Ce texte est un faux conflit pour détourner les Français des vrais enjeux.» La sonnerie signalant le début des questions au gouvernement résonne.
14h45. Le regrets de Mariani sur le référendum
Figure de la Droite populaire, courant à la droite de l’UMP, Thierry Mariani regrette que François Hollande ait refusé un référendum sur le mariage homo. «Ce n’est pas une loi classique, mais un loi qui changera la société et sur laquelle on ne pourra pas revenir.»
L’ancien ministre des Relations avec le Parlement, Patrick Ollier, aurait aussi souhaité une consultation populaire. Il affirme surtout avoir recueilli les confidences de socialistes et communistes mal à l’aise «pour qui le texte est difficile à accepter» mais qu’ils voteront, consigne de groupe oblige. «Le PS a une méthode particulière : il est adepte des libertés mais impose l’autorité dans ses rangs», moque-t-il.
14h40. «Reconnaissance sociale et symbolique»
Parmi les personnalités remarquées ce mardi figure Franck Riester , l’un des deux seuls députés UMP à annoncer son intention de voter le texte, pour «la reconnaissance sociale et symbolique de l’amour homosexuel». «On ne sera pas la majorité mais on sera quelques uns» à droite, promet le quadra, élu de Seine-et-Marne, qui assure qu’ «un grand nombre de sympathisants et de militants UMP sont favorables» au mariage pour tous.
A lire aussi l’entretien avec Franck Riester sur ce projet de loi, paru le 10 octobre dans Libé et son portrait
L’écolo Denis Baupin promet, lui, une gauche «rassemblée» pour adopter le projet de loi Taubira. Il rappelle que ce matin en conférence des présidents, Claude Bartolone (PS, président de l’Assemblée nationale, a demandé «que l’image du Parlement ne soit pas abîmée à l’issue de ce débat».
14h30. L’UMP «prépare le coup d’après»
Une demi-heure avant la séance de questions au gouvernement, ce sont surtout les députés de droite qui sont de sortie salle des Quatre-Colonnes. Les deux orateurs du groupe UMP, Hervé Mariton et Philippe Gosselin, attirent des grappes de caméras. Le premier, député de la Drôme, défend les plus de 5 000 amendements déposés par la droite, «ni excessivement nombreux, ni déplacés, sauf à refuser le débat». «Aucun dérapage ne peut nous être objectés», assure Mariton, tandis que Philippe Gosselin dément toute stratégie d’obstruction. Si l’élu de la Manche promet de «faire des propositions», notamment sur le contrat d’union civile ou le statut du beau-parent, il est pessimiste sur ses chances de bloquer le texte. «On prépare le coup d’après, éventuellement au Sénat où la majorité est fragile, on l’a déjà vue flancher.»
14h20. Les députés Front de gauche diront majoritairement «oui»
Neuf des dix députés du Front de gauche voteront en faveur du projet de loi ouvrant le mariage et l’adoption aux couples homosexuels, seul l’élu de l’Oise Patrice Carvalho votant contre, selon leur chef de file, André Chassaigne.
13h30. Bussereau regrette le nombre d’amendements
Le député UMP Dominique Bussereau (photo AFP) se déclare «pas fanatique des 5 000 amendements» déposés très majoritairement par l’opposition, tout en précisant qu’il allait «voter contre» le texte. «Je fais partie de ceux qui vont voter contre mais qui ne sont pas fanatiques des 5 000 amendements, comme je n’étais pas non plus fanatique des 138 000 amendements du Parti socialiste» sur la privatisation de GDF en 2006, dit-il.
13h15. EELV déposera des amendements sur la PMA
Co-présidente du groupe EELV à l’Assemblée, Barbara Pompili (photo AFP) réaffirme «le soutien» des écologistes au gouvernement tout en constatant «une divergence de stratégie» sur la PMA. Alors que les socialistes ont reporté l’élargissement de la PMA aux couples de lesbiennes au futur texte sur la famille programmé en mars, les Verts vont défendre un amendement sur la question dès l’examen du projet mariage. «Dans ce texte qui veut remettre d’équerre l’égalité entre tous, on recréé une inégalité. C’est cela qu’on trouve dommage», estime la députée, croisée salle des Quatre colonnes.
12h45. Le Roux compte sur «deux cents heures de discussion»
Le patron des députés PS, Bruno Le Roux (photo AFP), vante une réforme «rassembleuse et nécessaire» qui franchit «un nouveau pas dans l’égalité». Au cours des deux prochaines semaines («deux cents heures de discussion possible»), il appelle à «un débat de fond qui fasse honneur au Parlement» et met en garde contre «la stratégie d’obstruction de l’opposition». Et de dénoncer ces amendements «atterrants parfois déclinés en plusieurs dizaines d’exemplaires», comme ceux autorisant la polygamie, ou ceux interdisant l’adoption par des personnes célibataires.
12h15. Jean-Marc Ayrault «serein»
Le Premier ministre (photo AFP) déclare s’«attendre à des tentatives de l’opposition de durcir le débat» sur le mariage homosexuel, ajoutant aborder cette discussion «avec beaucoup de sérénité». Jean-Marc Ayrault se dit convaincu que «ce projet de loi qui présente bien des progrès en matière d’égalité sera adopté par une large majorité».
11h40. Wauquiez réclame la liberté de conscience des maires
La «liberté de conscience» refait surface. Evoquée mi-novembre par François Hollande, qui avait ensuite fait marche arrière, elle est de nouveau réclamée mardi par l’ex-ministre UMP Laurent Wauquiez , qui appelle le Président à «tenir sa promesse». «Il y a un minimum de respect à avoir pour les élus républicains», selon Laurent Wauquiez. Or «dans la loi, il n’y a plus aucune trace de ce qui était l’engagement de Hollande. Qui crispe les choses ?»
11h30 . Harlem Désir veut un «débat digne»
Le premier secrétaire du PS Harlem Désir (photo AFP) appelle sur France 2 à un «débat digne». «Déposer 5 000 amendements, de la part de la droite, c’est montrer qu’ils sont davantage dans une attitude d’obstruction que de proposition», pour «un texte aussi court, aussi simple !», plaide-t-il. Il y a dans la société française «un très grand refus de voir les dérapages homophobes auxquels ont donné lieu les manifestations des anti droit au mariage», met en garde le numéro un socialiste.
9h30. Boutin évoque un «clivage de la société»
«Une France nouvelle s’est levée le 13 janvier» pour la présidente du Parti chrétien démocrate Christine Boutin (photo AFP). Sur Canal +, l’ex-ministre pointe «un clivage très important» en train de s’installer. «Les Français qui sont opposés à ce texte ont le sentiment de ne pas être entendus», «la façon dont ça a été mené politiquement n’est pas une attitude responsable», a-t-elle accusé. «Pour la paix sociale, alors que nous avons bien d’autres sujets à régler, il vaudrait beaucoup mieux que le président consulte le peuple, et on verrait!», a-t-elle encore lancé.
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A l’extérieur de l’hémicycle. «On a beaucoup entendu les anti, c’est le cri des perdants»
L’avocate Caroline Mécary (photo AFP) engagée depuis quinze ans pour le respect des droits des homosexuels, arrive à l’Assemblée nationale pour assister au débat. «Je suis là, bien sûr. Je ne pouvais pas ne pas être là, aujourd’hui, pour l’ouverture des débats. J’ai une confiance absolue en l’adoption de ce texte. Il sera voté, je n’ai aucun doute là dessus. Je pense d’ailleurs que le vote de la loi aura un effet apaisant et apportera une forme de sérénité. Ces dernières semaines, on a beaucoup entendu les anti, avec une homophobie latente et larvée. C’est le cri des perdants. Ils savent que le texte sera adopté. Ils se lâchent aujourd’hui mais demain, quand la loi sera votée, les bouches haineuses se tairont. J’espère que les débats dans l’hémicycle seront dignes. En adoptant ce texte, la France va mettre fin à une discrimination légale qui touche 3,5 millions de citoyens qui ont la particularité d’être homosexuel. C’est un texte symbolique fort, qui aura un écho à l’étranger. C’est certain.»
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«Notre avenir se joue ici»
Elles s’embrassent toutes les deux secondes devant les grilles de l’Assemblée. Elodie, 34 ans, et Claire, 22 ans, ne vont pas tarder à reprendre le train pour Montpellier. Elles sont venues pour participer à la manifestation dimanche mais tenaient absolument à faire un saut devant l’Assemblée nationale ce mardi de repartir. «C’est historique, s’enflamme Elodie. Notre avenir se joue ici. On va pouvoir se marier, construire une famille. J’ai déjà demandé Claire en mariage mais quand le texte sera adopté, on pourra poser une date. Je rêve, un jour, de dire à nos futurs enfants que leur deux mamans sont mariées depuis quarante ans….» Claire la coupe : «On n’en est pas encore là. Il faut encore l’autorisation de la PMA (procréation médicalement assistée). La bataille est loin d’être terminée.»
Elodie et Claire sont venues avec Vincent Autin, le président de la lesbian and gay pride de Montpellier. Lui et «(s)on petit Bruno» ont été invités par la ministre des Droits des femmes, Najat Vallaud-Belkacem, pour assister au débat parlementaire. «Elle nous a promis que nous serions le premier couple à nous marier lors de sa visite à Montpellier. Nous sommes très fiers d’être là. C’est un combat de citoyenneté qui nous dépasse largement. On se bat pour les enfants des prochaines générations. Ce que j’attends des débats aujourd’hui ? Une fin heureuse comme dans un film de cinéma. Et s’il pouvait ne pas y avoir de dérapages homophobes… Mais malheureusement, on s’y attend. L’habitude…»
«Toute la droite revient quand Guaino prend la parole»
Annie, «plus de 60 ans», croisée à la sortie de l’hémicycle. Aujourd hui, c’était sa première fois à l’Assemblée. «C’est tombé le premier jour du débat sur le mariage, un hasard. Mais je suis ravie. Bien sûr, je suis pour le mariage pour les couples homosexuels. Pas franchement pour eux, à vrai dire je m’en fiche un peu. Mais c’est surtout pour les enfants que c’est important.» Annie doit filer à une conférence sur la pauvreté mais envisage de revenir dans la tribune des invités cette nuit. «C’est un grand cinéma cette assemblée. Il faut les voir faire. Toute la droite revient quand Guaino prend la parole. Ils huent quand Taubira s’exprime. Un grand jeu.»
Jean et Danielle, 69 et 67 ans, retraités, repartent comme ils sont arrivés. Déçus que le débat se fasse dans l’hémicycle et pas par voie de referendum. «Nos députés ont des questions bien plus importantes à traiter que le mariage homosexuel, se désole Jean. Le chômage, le déficit qui se creuse… La situation en Afrique. Et puis, en traitant le sujet par un texte de loi, on balaie d’un revers de main une question de société qui appartient au peuple. Une loi va laisser des traces. Plus tard, on dira, c’est la gauche qui a laissé faire ça. Avec un referendum, ce n’est pas pareil. C’est la voix du peuple.» Sur le fond, Danielle est opposée au projet. «Le mariage à la limite. Mais pas l’adoption et encore moins la pma, je ne peux pas m’y faire». C’était leur troisième passage a l’Assemblée- une première fois pour «voir» et la fois dernière, lors du débat sur le voile. «On n a pas encore fait le Sénat. Faudra qu’on y aille», ajoute Danielle.
Ce que prévoit le texte
Traduction de l’engagement 31 du candidat Hollande à la présidentielle, le projet de loi indique que «le mariage est contracté par deux personnes de sexe différent ou de même sexe». Il ouvre le droit à «l’adoption conjointe d’un enfant par les deux époux ou à l’adoption de l’enfant du conjoint». La garde des Sceaux Christiane Taubira parle de «corriger une inégalité flagrante» entre les couples hétérosexuels et homosexuels en permettant à ces derniers de se marier et d’adopter. «Le projet de loi donne simplement les mêmes droits et confère les mêmes devoirs aux couples homosexuels : les conditions du mariage sont inchangées», a-t-elle précisé dans le Journal du dimanche. Le livret de famille des couples hétérosexuels ne sera pas modifié : la référence au père et à la mère sera maintenue. Il s’agit de «protéger» les droits des enfants de couples homosexuels, selon Christiane Taubira.
En revanche, la question de la procréation médicalement assistée (PMA), qui devait faire l’objet d’un amendement des députés socialistes, sera dissociée du texte sur le mariage pour tous. La PMA figurera dans le projet de loi sur la famille prévu en mars.
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L’opposition prête à riposter
A l’exception de quelques UMP, tels Franck Riester et Benoist Apparu, favorables au mariage gay, et de socialistes qui pourraient ne pas voter le texte, les positions sont tranchées. Ainsi, les opposants au texte prévoient de déposer plus de 5 000 amendements. L’UMP déposera trois motions de procédure, dont une exigeant un référendum – François Hollande a réaffirmé le 16 janvier qu’il refusait une consultation populaire sur ce sujet.
Après les motions de procédure défendues par la droite, une soixantaine d’orateurs doit s’exprimer au cours de cette discussion générale. Parmi eux figurent notamment Marie-George Buffet (PCF), Elizabeth Guigou (PS) et, pour l’UMP, Nathalie Koscisko-Morizet, Jean-François Copé, François Fillon, ou encore Bernard Accoyer.
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Photo Kenzo Tribouillard. AFP
La grogne se fait aussi sentir hors de l’Assemblée : ce mardi, le collectif La Manif pour tous, fer de lance de la contestation, a accroché aux ponts de Paris des banderoles en guise de contestation. On y lit des slogans tels que «Un père et une mère c’est élémentaire» ou encore «Tous nés d’un homme et d’une femme». L’Institut Civitas, proche des catholiques intégristes, a de son côté appelé à une veillée de prières devant l’Assemblée mardi à 20 heures.
Le calendrier
Les débats devraient s’achever le 10 février. Le vote solennel du projet de loi devrait, lui, avoir lieu le 12 février. Ensuite, le texte sera examiné par le Sénat, avant un vote définitif au printemps.