Le refus de célébrer une union non mixte EST une infraction pénale.

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Agnès Leclair

FAMILLE Avant même la présentation du projet de loi sur le mariage gay, certains s’imaginent déjà à l’heure des célébrations en mairie. Une perspective qui n’enchante apparemment pas le député maire d’Orange, Jacques Bompard (Ligue du Sud). « On rentre là dans le même domaine que le médecin qui veut ou ne veut pas pratiquer un avortement, a déclaré mardi cet ancien FN. Il me semble qu’il doit y avoir là la clause de conscience et si elle n’y était pas, ça signerait que nous sommes dans un monde totalitaire, ce qui déjà est bien avancé. » Cet opposant au mariage entre personnes du même sexe envisage de laisser opérer dans ce cas « des élus de l’opposition qui vont être absolument ravis de pouvoir commettre cet exploit ». S i le projet de loi du gouvernement était voté, les maires seraient en effet en première ligne. C’est pourquoi l’Institut Civitas, mouvement proche des catholiques traditionnalistes, a lancé un appel pour sensibiliser ces élus, notamment « les maires des petites communes rurales, non étiquetés ».

La ministre de la Justice, Christiane Taubira, a toutefois bien indiqué mardi dans un entretien à La Croix que les maires ne seraient pas autorisés à refuser de célébrer ces nouveaux mariages entre deux personnes du même sexe une fois le texte voté. « Les maires sont des officiers publics qui représentent l’État lorsqu’ils célèbrent un mariage, c’est une mission dont ils sont très fiers. Nous sommes dans un État de droit, le Code civil va être modifié, il s’impose à tous, y compris aux maires. Il ne sera pas inscrit dans la loi qu’ils puissent se soustraire au Code civil », a indiqué la garde des Sceaux. Ainsi, l’élu qui refuserait d’appliquer la loi s’exposerait à l’avenir à des poursuites pénales.

« Refuser de marier deux gays ou deux lesbiennes, ce serait comme refuser de marier deux noirs uniquement parce qu’ils sont noirs, par exemple, c’est une infraction pénale », souligne Me Caroline Mécary, l’avocate qui avait défendu Noël Mamère dans l’affaire du mariage de Bègles (Gironde). Pour elle, ces éventuels cas de « désobéissance civile » ne seraient toutefois pas tout à fait comparables au geste de l’ex-leader des Verts.

Acte de courage pour les uns, parodie pour les autres, le 5 juin 2004, l’élu de Bègles avait bravé l’opposition du procureur de Bordeaux, pour unir un couple d’hommes, Stéphane Chapin et Bertrand Charpentier.

Ce mariage hors de la légalité avait ensuite été annulé par le tribunal et la cour d’appel de Bordeaux, se fondant sur la définition du mariage comme l’union d’un homme et d’une femme. L’élu, lui, avait également été suspendu un mois, sur décision du ministre de l’Intérieur, un cas exceptionnel – mais il avait bénéficié d’une très large couverture médiatique…

En septembre 2011, en Polynésie, c’est un maire de la commune de Taputapuatea qui a été condamné, sans tapage médiatique, par la cour d’appel de Papeete, à 4 100 euros d’amende pour avoir refusé de célébrer en novembre 2009 l’union d’un couple où la femme était un transsexuel. L’élu, de confession adventiste, avait mis en avant ses convictions religieuses pour expliquer son opposition. Il a en outre dû verser 625 euros à chacun des deux plaignants. Mais a finalement échappé à la sanction d’inégibilité.