GPA, une mère biologique reconnue par la justice

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Le tribunal de Nantes a accepté la retranscription intégrale (père et mère) de l’acte de naissance d’une petite fille née en 2015 d’une gestation pour autrui aux États-Unis, après un don de gamète de la mère d’intention.

BIENVAULT Pierre

Jeudi 23 mai, le tribunal de grande instance (TGI) de Nantes a validé la retranscription complète, avec le nom du père et de la mère, de l’acte de naissance d’une petite fille née en 2015 aux États-Unis après une gestation pour autrui. « Cette décision est une première » , affirme Me Matthias Pujos, qui défend le couple, ce que conteste Me Caroline Mécary, avocate spécialisée dans ce type de dossiers.

Pour comprendre, il faut préciser le contexte de cette décision. Alors que la GPA reste strictement interdite en France, un débat juridique existe autour de la retranscription, dans le droit français, des actes de naissance d’enfants nés de cette manière à l’étranger.

En mai 2017, la Cour de cassation s’est prononcée en faveur d’une retranscription partielle de l’acte de naissance en y faisant figurer le père biologique mais pas la mère d’intention. Pour la Cour, il faut que la mère adopte l’enfant pour être pleinement reconnue comme parent légal de l’enfant. Une position inscrivant la GPA dans le droit de la famille classique, qui veut que la mère soit celle qui accouche, ou bien celle qui adopte.

En première instance, toutes les demandes de retranscription d’enfants nés par GPA se font devant le TGI de Nantes. De fait, c’est dans cette seule juridiction que sont enregistrés les actes de naissance d’enfants nés à l’étranger. Dans ce cas précis, le tribunal de Nantes avait à se prononcer sur une GPA réalisée à la demande d’un couple vivant aux États-Unis, composé d’une Française et d’un Américain, après plusieurs échecs de fécondation in vitro.

« Cette femme a fait un don de ses gamètes et a donc transmis son patrimoine génétique à sa fille née par GPA. Même si elle n’a pas accouché, cette femme est donc la mère biologique de l’enfant et c’est précisément pour cette raison que le TGI de Nantes l’a reconnue comme la mère d’intention. C’est pour cela que cette décision est une première » , argumente Me Pujos.

Une affirmation contestée par Me Mécary. « Cela fait plusieurs années que le tribunal de Nantes fait de la résistance par rapport à la jurisprudence de la Cour de cassation et prononce des retranscriptions intégrales et non partielles pour des couples homosexuels et des couples hétérosexuels, que la femme soit ou non la mère biologique » , indique l’avocate, en précisant que ces décisions de première instance sont à chaque fois suivies d’un appel. « La cour d’appel de Rennes revient alors à une retranscription partielle en suivant pour le coup la jurisprudence de la Cour de cassation » , ajoute Me Mécary. Dans cette décision du 23 mai, le TGI de Nantes fait valoir que « l’intérêt supérieur de l’enfant » implique « la reconnaissance de la situation constituée à l’étranger en conformité avec la loi étrangère, afin de garantir sur le territoire national le droit au respect de son identité, dont la filiation et la nationalité française constituent un aspect essentiel » .

Le tribunal estime que la position de la Cour de cassation (transcription du seul père biologique, adoption pour la mère), serait impossible dans ce dossier: le père étant américain, il ne peut demander la retranscription partielle de l’acte de naissance de sa fille sur des registres français. « Au surplus, il y aurait lieu de s’interroger sur la validité d’une adoption par la mère biologique de l’enfant » , ajoute le tribunal.