La victoire de Caroline Mecary: la cour de cassation valide la transcription pour les couples d’hommes

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Emmanuelle Lucas et Flore Thomasset

Saisie par deux couples d’hommes, la Cour de cassation a validé pour chacun, mercredi 18 décembre, la transcription intégrale de la filiation de leurs enfants nés aux États-Unis par gestation pour autrui, reconnaissant le père biologique et le père d’intention.

C’est une décision qui ne représente pas une rupture de jurisprudence mais qui n’en est pas moins inédite. Pour la première fois, la Cour de cassation a validé, mercredi 18 décembre, la transcription de la filiation d’enfants nés par gestation pour autrui aux États-Unis pour deux couples d’hommes, reconnaissant à la fois le père biologique et le père d’intention. Le tout sans leur imposer de passer par une procédure d’adoption.

Une décision inédite

Cette décision s’inscrit dans la droite ligne de la dernière décision Mennesson, du nom de ce couple qui a obtenu, en octobre dernier, la transcription intégrale de l’état civil de leurs filles nées par GPA aux États-Unis. La justice française a alors reconnu la filiation du père biologique comme de la mère « d’intention », sans leur imposer d’en passer par une adoption. Le juge avait en effet estimé que, dans leur cas particulier, et au regard notamment de l’âge des filles désormais majeures, l’adoption n’était pas dans l’intérêt de ces dernières.

Avec la décision du 18 décembre, le cas d’espèce lié aux Mennesson semble donc faire jurisprudence. Et pour la première fois, suivant cette logique, la Cour se retrouve à valider la transcription intégrale de l’état civil pour des couples d’hommes. Une décision qui peut sembler étonnante alors que mi-décembre encore, la Cour européenne des droits de l’homme avait validé la procédure française passant par l’adoption.

La « cohérence » du droit français à rude épreuve

La Cour fait donc un pas de plus dans la reconnaissance, même indirecte, de la GPA. Si l’avocate des deux couples, Caroline Mécary, a salué une « victoire », ce jugement a soulevé de vives critiques chez les opposants à cette pratique. « Désormais, le risque est que tout ce qui est pratiqué à l’étranger soit accepté en France », déplore ainsi la juriste Marie-Christine Le Boursicot.

Si elle reconnaît que « l’interdiction de la GPA existe toujours dans le droit français », notamment dans le Code civil, cette spécialiste relève que « la cohérence de celui-ci est mise à rude épreuve » : « Afin de rétablir la cohérence, il n’existe que deux moyens, reprend Marie-Christine Le Boursicot. Soit revenir en arrière et prendre une loi pour dédire la Cour de cassation, ce qui semble inimaginable ; soit légaliser la GPA pour éviter toute discrimination. Le législateur se trouve donc, de fait, au pied du mur. Doit-il franchir le pas ? »

Des questions qui ne manqueront pas de revenir lors de l’examen du projet de loi de bioéthique en séance, mi-janvier, au Sénat. Cette décision pourrait aussi avoir un impact sur la circulaire que le ministère de la justice prépare depuis des mois pour uniformiser les pratiques des juges sur le territoire. Censée « rappeler l’état du droit existant », retiendra-t-elle la nécessité d’un passage par une procédure d’adoption, comme la Chancellerie l’assurait en septembre, ou la transcription automatique ?