Caroline Mécary : « L’ouverture de la PMA sera une sécurité pour l’enfant »
Un projet de loi va autoriser la procréation médicalement assistée pour les couples de femmes et les femmes seules. Une étape décisive selon Caroline Mécary.
Auteure des « Que sais-je ? » sur L’Adoption, Les Droits des homosexuel/les, Le Pacs et L’Homophobie, Caroline Mécary ajoute à la collection un titre consacré à la procréation médicalement assistée et à la gestation pour autrui (1).
Depuis une dizaine d’années, cette avocate aux barreaux de Paris et du Québec accompagne des familles qui partent à l’étranger pour avoir recours à ces pratiques et se retrouvent face à des difficultés juridiques en France_. « Ces parcours nous conduisent aujourd’hui à réinterroger nombre de choix retenus par le législateur en 1994 »,_ écrit-elle. L’ouverture des techniques d’assistance médicale à la procréation compte en effet parmi les sujets les plus débattus de cette révision 2019 de la loi sur la bioéthique, avec la levée de l’anonymat sur le don de gamètes. Présenté en conseil des ministres fin juillet, le texte doit entrer en discussion à l’Assemblée nationale fin septembre.
Pourquoi la PMA s’est-elle imposée comme sujet phare dans le débat sur la révision des lois de bioéthique ?
Caroline Mécary : La question de la PMA regroupe toutes les problématiques d’infertilité, qu’elle soit pathologique ou sociologique (un couple de même sexe ne peut pas procréer). L’ouverture de la PMA suppose que l’on quitte le modèle hétérosexuel traditionnel et dominant à 95 %. Elle concerne aussi les femmes célibataires, ce qui pose la question de savoir si une femme peut avoir un enfant sans qu’il y ait, au moment de la naissance, un père ou une deuxième mère pour cet enfant.
Dans deux avis parus respectivement en juin 2017 et en septembre 2018, le Comité consultatif national d’éthique explique pourquoi cette ouverture, dans les deux cas, ne pose pas de problème éthique.
Quelles réticences persistent vis-à-vis de l’ouverture de la PMA aux couples de femmes et aux femmes seules ?
Cette ouverture ne gêne en réalité que les plus conservateurs. Soit l’Église catholique et la Manif pour tous, lesquelles se rejoignent pour dire qu’on devrait même ne pas pouvoir concevoir un enfant avec un tiers donneur. Au début des années 1990, quand on a commencé à débattre de l’encadrement des techniques médicales d’aide à la procréation, certains prétendaient qu’il n’était pas possible de concevoir un don de gamètes ou d’ovocytes autrement que comme un adultère. Aujourd’hui, le vocabulaire diffère, mais le discours demeure : pas de conception « en dehors » de la procréation charnelle. C’est une opinion, d’ailleurs contredite par les législateurs des pays membres du Conseil de l’Europe : 14 d’entre eux autorisent les PMA aux couples de femmes, et 26 à des femmes célibataires.