Homos : une victoire qui fait l’exception
Justice. Une couple de femmes séparées a obtenu l’autorité parentale partagée.
Marie-Joëlle Gros
C’est une victoire de plus. La cour d’appel de Paris vient d’accorder l’autorité parentale partagée à un couple de femmes qui se sont séparées en 2005, après dix années passées ensemble. Depuis leur rupture, elles ont organisé « d’un commun accord» la vie de leurs deux enfants (portés seulement par l’une). Cette bonne entente entre elles, confirmée par la volonté de la mère biologique d’accorder l’autorité parentale partagée à son ex-compagne, a convaincu la cour. «Sans ce climat bienveillant entre elles, qui permet une vie stable aux enfants depuis six ans, cette victoire n’aurait pas été possible», souligne Caroline Mécary, leur avocate.
C’est la deuxième fois que la justice accorde l’autorité parentale partagée à un couple homosexuel séparé, après l’arrêt de la cour d’appel de Rennes du 30 octobre 2009. Concrètement, la mère «sociale» dispose désormais des mêmes droits que la mère biologique : elle peut voyager à l’étranger avec les enfants, donner son feu vert à une décision médicale, etc. L’arrêt parisien devrait faire jurisprudence car le ministère public ne s’est pas pourvu en cassation. C’est d’ailleurs dans l’attente de l’expiration de ce délai que l’arrêt, rendu le 1er décembre, n’avait pas été rendu public. «Mais un important aléa juridique demeure, note Caroline Mécary. Comme c’est au bon vouloir du juge, des décisions inverses continueront de tomber tant que la loi ne sera pas modifiée en France.» La cour d’appel de Nancy a en effet refusé dans un arrêt du 10 février un droit de visite et d’hébergement à une mère sociale séparée d’une mère biologique.
Face à cette «insécurité juridique» fréquemment dénoncée par les associations de parents homos, le Centre LGBT (lesbien, gai, bi et trans) de Paris-Ile-de-France a rappelé lui aussi, hier, qu’une modification législative devait intervenir. En effet, ces questions seraient réglées si la France autorisait l’adoption simple de l’enfant par le parent social. C’est déjà possible pour les hétérosexuels séparés. Dix pays européens (Belgique, Pays-Bas, Espagne, Royaume-Uni, etc.) ne s’encombrent pas de cette nuance entre couples hétéros ou homos. D’où l’impatience de certains : «Après les déclarations de Nicolas Sarkozy opposé au mariage homosexuel et à l’adoption, souligne l’avocate Caroline Mécary, si l’on veut que la loi change, il faut commencer par changer de majorité présidentielle et législative.»