Pour Maitre Caroline Mécary, le mouvement ne s’essouffle pas

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Devant les grilles de la boutique Louis Vuitton place Vendôme (Ier arrondissement de Paris), on sort à la hâte un cercueil du coffre d’un chauffeur Uber. Symbole de la mort de la justice pour la trentaine d’avocats grévistes venus rappeler vendredi matin leur opposition à la réforme des retraites. Les visages sont fermés, certains bardés d’un voile noir ou d’une paire de lunettes sombres. La destination finale de cette procession : le parvis du ministère de la Justice. Tous arborent des fleurs blanches et marchent au pas, alignés derrière le cercueil fait de carton et de tulle sombre. Pour Magali Guadalupe Miranda, avocate au barreau de Nanterre (Hauts-de-Seine), cette réunion est «le symbole de l’enterrement de quelqu’un qui nous est cher, la justice. Elle nous a quittés après une longue agonie et comme c’est souvent le cas, elle connaissait bien son assassin : le gouvernement». Pour la jeune avocate, mobilisée depuis le début de la grève, l’exécutif, censé protéger l’institution, «lui a infligé un coup fatal avec le 49.3».

La procession débute sous le regard intrigué des passants et des travailleurs. «Toutes mes condoléances», lâche, amusé, un jeune homme avant de s’engouffrer dans le ministère, dont les portes ont été soigneusement fermées. Après quelques minutes de marche, la colonne se fige sous les fenêtres de la Chancellerie avant de se disposer en arc de cercle autour de la tombe factice. Touristes et badauds dégainent leur smartphone pour immortaliser la scène inédite qui vient troubler le calme du très chic quartier parisien, célèbre pour ses maisons de mode et boutiques de luxe. «Ils ont raison de manifester. S’il n’y a plus d’avocats et de petits cabinets pour nous défendre, c’est nous qui allons en pâtir, souffle un passant. Les élites nous ont bien eus. C’est la nouvelle France maintenant.»

«Le mouvement ne s’essouffle pas, promet Caroline Mécary, avocate à Paris. Les défenses massives continuent et nous avons délivré de multiples assignations à l’Etat. Malgré l’opinion publique défavorable et l’avis du Conseil d’Etat qui a étrillé le gouvernement, nous sommes face à un mur. Le pouvoir refuse de discuter. Mais le projet doit encore être discuté au Sénat. La partie n’est pas encore jouée.» Jeudi, dans des propos rapportés par le Point, Emmanuel Macron s’est dit «très agacé par la gestion de la colère des avocats par le gouvernement à l’occasion de la réforme des retraites». Il a également déclaré ne pas comprendre «pourquoi, alors que nombre de fronts avec d’autres secteurs professionnels, inquiets par cette réforme, ont été déminés, celui-ci perdure». «Comme c’est dommage, il est agacé, le pauvre. Il dirige tout et on l’ennuie», ironise une avocate, rose blanche à la main et masque chirurgical frappé d’un «49.3» sur le visage.

Après une petite heure de déambulations et d’une cérémonie funéraire emblématique, les grévistes déposent une gerbe de fleurs aux pieds des agents et de quelques CRS venus spécialement devant la Chancellerie. «Emmanuel Macron, si tu pars en prison on ne te défendra pas !» chantent en chœur les manifestants.

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